Vous êtes ici
Accueil > Interviews > ANNA TERNHEIM – Interview – Paris, mardi 7 avril 2009

ANNA TERNHEIM – Interview – Paris, mardi 7 avril 2009

ANNA TERNHEIM - Interview - Paris, mardi 7 avril 2009

Star en Suède, Anna Ternheim reste encore aujourd’hui un secret trop bien gardé en France. A l’heure où sort enfin son troisième album chez nous, ‘Leaving On A Mayday’, nous avons pu rencontrer l’artiste. L’occasion idéale de découvrir son univers à quelques jours de son concert au Café de la Danse, le 29 avril.

Bonjour Anna! Ton nouvel album vient de sortir en France, et il semble qu’une fois encore il nous arrive bien en retard! Pourrais-tu rapidement résumer ta carrière au public Français qui ne te connaîtrait pas encore ?

Anna : Tout est arrivé très tard en effet, puisque mon premier album est sorti en France un an et demi après la Suède, sur le label indépendant Telescopic. En revanche j’ai beaucoup joué en France l’année où cet album est sorti, j’ai notamment participé au festival Les Femmes S’en Mêlent et d’autres concerts à Paris.

Oui, moi je t’ai vue il y a 2 ans au Point Ephémère, c’était sympa…

Anna : Tu trouves ? C’était un show un peu effrayant pour moi en fait ! J’ai raté pas mal de choses (il y avait eu pas mal de petits soucis techniques, ndlr), mais bon ! Le disque est sorti tard en France parce qu’au début j’avais besoin de temps pour travailler, pour tourner… Il fallait donc que les choses se mettent peu à peu en place, et que ça arrive au bon moment.

Enfin, aujourd’hui nous sommes là pour parler du nouvel album ! J’ai remarqué que le son de chacun de tes disques est assez différent, est-ce un choix délibéré de ta part ou verrais-tu cela comme une évolution logique ?

Anna : Je crois que je ne pouvais pas faire autrement. Des choses t’arrivent, la vie change. J’ai fait de la musique en permanence pendant tout ce temps et je pense qu’il y a des moments ou c’est la musique qui te rattrape, il faut suivre ses impulsions, travailler avec de nouvelles personnes aussi. Il y a une part de conscient, mais de toute façon depuis que je fais ça il y a toujours eu du changement, et c’est ce que j’aime.

C’est plus excitant que de refaire la même chose deux fois…

Anna : Oui, ce n’est pas ce que je veux, ce qui ne veut pas dire qu’il faille changer toutes les personnes qui travaillent avec moi. Mais par exemple c’était la première fois que je travaillais avec Björn (de Peter, Björn & John, ndlr) et de nouveaux musiciens, dont ça a forcément changé pas mal de choses, et ça peut s’entendre. Et qui sait ? Peut-être travaillerai-je avec des personnes encore très différentes la prochaine fois, c’est aussi un nouveau challenge.

Peut-être en avais-tu un peu assez de la Pop très orchestrée de ton précédent album ?

Anna : Oh oui ! Ca j’en avais marre! Bien que cela avait été fun à réaliser.

C’est la principale différence avec ‘Leaving On A Mayday’.

Anna : Oui, tu as raison. Le second album était construit sur des arrangements et dirigé par tout ça, et je mettais mon chant par-dessus. Cette fois, si on retire les paroles il ne reste pas grand-chose à part la batterie et les cordes. Mais ces quelques ingrédients réunis sonnent vraiment bien. Ca peut aussi venir du fait que j’ai beaucoup tourné, et c’est ainsi que les chansons commencent pour moi, c’est juste ma guitare et ma voix et je n’emmène pas un orchestre philarmonique avec moi en tournée.

ANNA TERNHEIM - Interview - Paris, mardi 7 avril 2009En un sens tu reviens à une ligne musicale plus Folk, comme sur le premier album, bien que celui-ci avait déjà pas mal d’arrangements.

Anna : Oui, c’est vrai. En ce qui concerne la manière dont je chante et j’ai écrit les chansons ça se rapproche plus du premier album. Mais cette fois-ci c’est sans compromis ! Et c’est ce que j’aime, c’est ce que nous avons décidé en commençant l’enregistrement, garder quelque chose de simple, avec peu d’éléments et la voix au centre.

Tu as donc travaillé avec Björn Yttling, qu’attendais-tu de lui ? Qu’est-ce que sa contribution a apporté à l’album ?

Anna : J’en attendais beaucoup ! Je n’ai pas été déçue, mais on ne sait jamais lorsqu’on travaille avec une personne pour la première fois ! J’ai tourné avec lui il y a deux ans, en compagnie de Nikolaï Dunger, un autre artiste suédois, donc je le connaissais déjà. Et j’aimais ce qu’il avait fait jusqu’ici ; il garde les choses très simples. Il a aussi travaillé pour beaucoup de genres musicaux différents et ça lui a donné une vision, il est capable de voir qui tu es et ce que tu veux et d’en tirer le meilleur. Par exemple il a produit l’album de Lykke Li l’an dernier – qui est complètement différent – et je trouve qu’il a su mettre à profit ses qualités.

Avant de travailler avec toi, j’ai lu qu’il t’avait dit d’écouter des genres complètement différents pendant 6 mois et de le rappeler après ?

Anna : Oui, et il fallait aussi je me nettoie un peu l’esprit. J’avais écouté tout ça auparavant (Nina Simone, Bob Marley et Cornelis Vreeswijk, ndlr), mais là j’étais coincée dans la Pop et les groupes à guitare. La question n’était pas de chanter comme Bob Marley, mais de trouver sa voix, sortir les mots de façon à ce que les gens t’entendent.

Tu as écrit des chansons en tournée auparavant ?

Anna : Seulement deux ou trois. J’ai écrit le reste à Stockholm. C’était une période plus calme et j’étais tranquille pour composer, j’ai besoin de temps quand j’écris.

C’est plus pratique que dans le tour bus ?

Anna : Je n’aime pas être interrompue ! Mais si l’occasion se présente en tournée, ça peut arriver.

Il y a un titre plus rythmé que les autres sur l’album, ‘Losing You’, pourrais-tu m’en parler un peu plus ?

Anna : Oui, au début cette chanson n’était pas prévue pour se retrouver sur l’album. C’est l’une des dernières que nous avons enregistrées, avec ‘Off The Road’ et ‘Black Sunday Afternoon’. Elles ont été enregistrées à New York avec d’autres musiciens, donc elles sonnent différemment. Il y avait Steve Shelley de Sonic Youth à la batterie. C’est une chanson plus Pop et elle a évoluée autour de la batterie.

C’est la raison pour laquelle tu es allée à New York ?

Anna : Non, en fait j’y habite, donc c’était prévu. On a réservé un studio pour une dizaine de jours, j’ai préparé quelques morceaux avec ma guitare, puis on s’est dit ‘quelle personne connaît-on ici pour enregistrer ?’… Et il était l’une d’elles, et d’autres sont venus afin d’apporter un peu plus d’extras, de caractère à ces chansons.

Je voulais aussi te parler de l’artwork de l’album. Pour le réaliser tu as travaillé avec Helena Blomkvist, peux-tu nous en parler un peu plus ?

Anna : C’est une photographe Suédoise qui a déjà fait 3 ou 4 expositions. Elle a trouvé son propre style. C’est arrivé un peu par accident. Il y a deux ans je suis allée à l’une de ses expos et il y a eu quelque chose dans ses photos qui m’a vraiment frappé. Un mélange d’obscurité et de lumière très brillante à la fois, mais aussi de l’humour, du jeu… Et je me suis dit ‘Il faut que je travaille avec elle !’. Alors je l’ai appelé et elle m’a dit qu’elle connaissait déjà ma musique et que ça l’avait inspiré pour son exposition ‘The Dark Planet’. Alors on s’est rencontré, on est allé prendre un café et on a parlé d’animaux, d’enfants, et de l’univers, je me souviens bien de cette discussion…

C’est pour cela que tu tiens un singe par la main sur la pochette ?

Anna : Oui, elle a beaucoup travaillé avec les animaux pour ses derniers travaux.

Y-a-t-il une signification derrière ça ?

Anna : Il doit toujours y en avoir une… je ne sais pas, on a beaucoup en commun avec les animaux, sauf que les singes sont parfois plus intelligents que nous !

Pour revenir à la musique, l’album est d’abord sorti avec un CD en bonus qui comprenait des reprises de Frank Sinatra, peux-tu nous expliquer ce choix ?

ANNA TERNHEIM - Interview - Paris, mardi 7 avril 2009Anna : Une fois encore c’est arrivé par hasard ! J’écrivais à ce moment-là pour une pièce de théâtre (de Stefan Metz, ndlr) à Göteborg. L’idée du metteur en scène était d’ouvrir le spectacle sur ‘New York New York’, ce qui n’allait pas vraiment bien avec le reste de la musique que j’avais composé. On a donc modifié mes chansons en studio de façon à ce qu’elles puissent devenir un ‘thème’ pour la pièce, donc il y en a eu plusieurs versions.

J’imagine qu’écrire pour une pièce est un exercice complètement différent de l’écriture d’un album, était-ce difficile ?

Anna : Oui, au début, parce que, par exemple lorsque tu écris une chanson Pop, tu recherches l’attention de tous, c’est ta chanson qui est au centre, alors que là mes compositions faisaient partie d’une contexte bien plus large, entre les acteurs, les lumières, la scène… la musique était là pour renforcer tout ça. Donc ça m’a pris un peu de temps pour m’y faire, et il y a beaucoup à apprendre, mais c’était vraiment amusant à faire. La pièce a débuté au printemps 2008, donc en fait je travaillais dessus alors que j’enregistrais mon album, je faisais les deux en même temps.

Et de manière générale, qu’écoutes-tu ?

Anna : Beaucoup de choses ! Ca passe par des périodes. En ce moment j’écoute pas mal de choses suédoises, Jenny Wilson notamment. J’écoute aussi El Perro Del Mar, j’ai eu le nouvel album de la part du groupe mais je ne crois pas qu’il soit encore sorti, mais je peux donc le recommander ! Enfin Sonny Rollins… L’été dernier j’écoutais aussi Amadou & Mariam, donc tu vois quand la connexion se fait ce n’est plus une question de style.

Et considérerais-tu la Pop suédoise comme une grande famille ?

Anna : Non, je ne pourrais pas dire ça. C’est un petit pays, donc forcément on est amené à se rencontrer. L’année dernière j’ai tourné avec El Perro Del Mar et Lykke Li, et c’était fun, mais la plupart du temps je dirais que je suis un chemin très solitaire. Je travaille beaucoup seule. Je n’ai pas la sensation de faire partie d’un collectif suédois par exemple.

Tu as déjà reçu pas mal de récompenses dans ton pays, dont 2 pour cet album, est-ce difficile à supporter ? Est-ce plus de pression sur tes épaules ?

Anna : Après le premier album j’ai effectivement ressenti plus de pression, sans vraiment pouvoir dire de qui ou de quoi cela venait. Ca a commencé à me hanter… Soudainement tu commences à penser à ce que tu fais, alors que tu ne te poses pas la question auparavant parce que le premier album est une chose qui vient spontanément du plaisir de jouer. Cela vient aussi de la transition, quand ta passion devient une chose avec laquelle tu peux vivre. Car c’est aussi un travail, et il y a donc des choses que l’on ne choisit pas. Mais aujourd’hui, travailler pour ce nouvel album a été un tel plaisir, et si enthousiasmant, quelque chose s’est vraiment passé. De toute façon quoique tu fasses tu ne peux pas plaire à tout le monde, il y aura toujours des mécontents, ce n’est donc pas la raison pour laquelle que je fais de la musique. C’est vrai qu’en Suède ça s’est très bien passé pour moi, mais ça faisait quelques années déjà que j’écrivais pour moi-même.

Le plaisir reste la clé ?

Anna : Oui, et ça paraît si simple dit comme ça ! C’est une joie de venir en France, ou de faire des choses pour la première fois. Par exemple lorsque j’ai déménagé à New York l’an dernier, j’ai beaucoup joué dans de petites salles là-bas et j’ai trouvé ça très excitant, c’était un autre type de challenge. Je fais ce dont j’ai envie, donc aujourd’hui ça me rend heureuse !

Propos recueillis le mardi 7 avril 2009 à Paris.

Une grand merci à Anna Ternheim et Sophie Neveu.

Anna Ternheim sera en concert au Café de la Danse à Paris le jeudi 29 avril 2009.

Pour plus d’infos :

Lire l’interview d’Anna Ternheim, le 13 avril 2016

Chroniques :

‘Live In Stockholm’ (2016)
‘For The Young’ (2015)

Session acoustique : « The Longer The Waiting (The Sweeter The Kiss) » – Paris, mardi 7 février 2012
Lire l’interview d’Anna Ternheim, le 7 novembre 2011
‘The Night Visitor’ (2011)

‘Leaving On A Mayday’ (2009)
‘Separation Road’ (2007)
‘Somebody Outside’ (2006)

Concerts :

Le Café de la Danse, Paris Mercredi 22 février 2012 : galerie photos
L’Alhambra, Paris, mercredi 23 septembre 2009 : galerie photos
Le Café de la Danse, Paris, mercredi 29 avril 2009 : compte-rendu / galerie photos
Le Point Ephémère, Paris, 31 mai 2007 : compte-rendu / Galerie photos

http://www.annaternheim.com/
http://www.facebook.com/annaternheim
https://twitter.com/AnnaTernheim

Laisser un commentaire

Top